Carrières Avis de décèsÉdition Électronique Rabaischocs.com Infolettre

Recherche

Recherche par terme

Journaliste

Date de parution

_

Catégories

Mines

Retour

11 mai 2025

Davide Buscemi - dbuscemi@medialo.ca

La ministre Blanchette Vézina : « le Québec entend devenir un joueur incontournable »

La ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette-Vézina, dans la mine d'or d'Eldorado Gold en mai 2023.

©Gracieuseté.

La ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette-Vézina, dans la mine d'or d'Eldorado Gold en mai 2023.

La ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette-Vézina, nous avait accordé le 10 mars une entrevue exclusive parue dans notre magazine Vos mines vous parlent. Elle y détaillait la stratégie pour accélérer l’exploitation des minéraux critiques et stratégiques. Alors que la province détient 80 % des réserves canadiennes de graphite et d’importantes quantités de lithium, Québec mise sur des ententes internationales pour affronter la guerre tarifaire.

Diversification des marchés : un enjeu stratégique
Le Québec cherche à réduire sa dépendance aux États-Unis depuis un certain temps. « On a déjà amorcé cette diversification en 2023, mais là tout s'accélère. 

Notre volonté est d'éviter de devenir dépendant du marché américain. Les pays européens veulent augmenter leurs budgets de défense, investir massivement pour avoir des chaînes d'approvisionnement qui sont plus résilientes. Lors d’une rencontre avec la Commission européenne, j'ai senti un changement de paradigme important.

Signée lors du dernier congrès de l’Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs (PDAC en anglais) à Toronto, l'entente avec les Pays-Bas est très stratégique parce que le port de Rotterdam est névralgique dans la distribution des chaînes logistiques en Europe. On travaille ensemble pour que les investissements européens se fassent en sol québécois et qu'on puisse déployer des chaînes d'approvisionnement vers l'Europe », explique Mme Blanchette-Vézina.

Échange gagnant-gagnant
D’un même souffle, elle enchaîne : « les Pays-Bas ont des connaissances en termes de pratiques de recyclage, de circularité des minéraux, de réutilisation des minéraux, dans la transformation des minéraux. C'est très stratégique pour le Québec parce qu'on sait qu'on peut réutiliser à l'infini nos minéraux. C'est stratégique pour les Pays-Bas qui ont besoin aussi de minéraux. Ils s'approvisionnent dans des chaînes asiatiques et en Australie. Ils souhaitent diversifier ». 

Après une première entente signée avec la France en 2023, Québec poursuit des discussions avancées avec l’Allemagne, l’Italie, le Royaume-Uni, le Japon, la Corée du Sud. Le Québec entend devenir « un joueur incontournable » dans un domaine où la Chine se taille la part léonine.

Le défi des redevances minières
Les municipalités minières réclament une meilleure redistribution des richesses issues de l’exploitation des ressources naturelles. « Nous avons lancé un projet pilote en Gaspésie pour voir comment les retombées pourraient être maximisées en termes d'investissements, pas nécessairement dans les infrastructures, mais pour les entreprises.  
Pour ce qui est des municipalités, je travaille avec le ministre des Finances qui souhaite garder une certaine répartition plus commune », expose la ministre.

Avant le PDAC, il y eut l’événement Mines & Money sis à Miami. « Pourquoi Miami ? La Floride est un endroit républicain accueillant beaucoup d'investissements québécois, d'entreprises québécoises. Saputo et Bombardier s’y trouvent.

J'ai eu la chance d’y rencontrer des élus républicains pour pouvoir discuter de la position du Québec face aux minéraux. On s’assure de tirer profit au maximum de ces investissements dans le cadre d'une guerre commerciale.

Le ministre des Finances, François-Philippe Champagne, a fait ajouter la notion de sécurité économique à une loi qui permet de bloquer certains investissements. Le fédéral va regarder à la pièce pour voir l'impact. » 

Accélération du développement minier et attractivité du Québec
Hors contexte de guerre tarifaire, l'on s’interroge sur ce qui est fait pour améliorer le taux de découverte et pour mettre plus rapidement des mines en production.

« Le Québec accélère l’exploration minière et réduit les délais pour ouvrir des mines plus rapidement. Grâce au Plan québécois pour la valorisation des minéraux critiques et stratégiques, les investissements en exploration ont augmenté de 300 %. Le processus d’obtention de permis a été réduit de 40 % grâce à une meilleure coordination entre ministères, sans compromettre les normes environnementales.

Pour stabiliser le marché, le Québec signe des ententes internationales garantissant des prix stables et favorisant des investissements respectant les normes environnementales, sociales et de gouvernance (ESG).

L’objectif est d’accélérer l’ouverture de mines tout en assurant un développement durable et responsable », décortique Mme Blanchette-Vézina.

©Gracieuseté.

Maïté Blanchette-Vézina dans la mine de sel (Windsor) aux Îles de la Madeleine en mai 2024.

©Gracieuseté.

La ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette-Vézina.

Les pouvoirs discrétionnaires
Cette notion peut sembler tranchée et abrupte. La dernière mouture législative en octroie une vingtaine à la ministre Blanchette Vézina. Le directeur de l’Association de l’exploration minière du Québec (AEMQ), Alain Poirier, prétend que ces pouvoirs discrétionnaires rallongent les délais, voire entravent le travail des sociétés minières.

« Tout pouvoir discrétionnaire doit être exercé dans le respect de l’équité et de la loi. Ces pouvoirs sont encadrés et contestables en cour. Leur objectif est d’offrir une certaine agilité dans des cas particuliers, mais cela ne signifie pas qu’ils seront utilisés systématiquement.
 
D’ailleurs, je ne les ai pas encore utilisés. La modernisation de la Loi sur les mines vise à rapprocher les entreprises minières des municipalités, ce qui était auparavant centralisé au gouvernement du Québec. Ce dialogue permet aux communautés locales de mieux comprendre les projets d’exploration.

Je vois ce rapprochement de façon positive et encourage les entreprises à échanger avec les municipalités pour assurer une meilleure acceptabilité et accélérer le développement minier au Québec », objecte la Magnymontoise caquiste.

L’intérêt public
Parmi ces pouvoirs discrétionnaires, il y a le fait de « refuser, différer, conditionner un bail minier pour des raisons d'intérêt public ». L'intérêt public paraît large. « Dans le passé, des gens faisaient de l'exploration minière à toute heure du jour et de la nuit. Malheureusement, ça donne une mauvaise image à tout le monde.

Donc, face à ces abus, l’idée est de pouvoir imposer certaines conditions. C'est sain de garder une exploration minière qui est vivante et de ne pas entacher les autres joueurs. Il est important d'avoir ces pouvoirs-là, bien que je ne les aie pas utilisés encore. Ce sont des pouvoirs exceptionnels qu'on va utiliser de manière responsable et équitable pour éviter des abus. On va analyser au cas par cas », précise-t-elle.

La réforme de la Loi sur les mines décriée
Après les critiques susmentionnées de M. Poirier, c’est au tour du porte-parole de l'organisme Québec meilleure mine, Rodrigue Turgeon. Il juge que les principales demandes « ont été balayées ». Il rappelle un jugement de la Cour supérieure soulignant des lacunes dans le régime minier à l'endroit des autochtones.

« Le dossier Québec Meilleure mine est judiciarisé. Je ne peux pas commenter davantage.»

« Cela dit, la Loi sur les mines apporte des avancées significatives pour les Premières Nations, et nous espérons qu'elles seront reconnues comme telles. L'objectif est de permettre le développement de projets miniers sur les terres publiques en établissant des relations positives et respectueuses avec les communautés. »

« Concernant ladite réforme, certains disent qu'on va trop loin, d'autres disent qu'il faudrait aller plus loin. On a été à la place équilibrée en matière environnementale. »

« L’avancée importante, c’est que tout projet minier devra passer devant un BAPE. C'est un processus transparent qui va, je le souhaite, éviter des délais : c’est un endroit centralisé pour l’analyse du processus environnemental », souligne la titulaire du portefeuille des Ressources naturelles.

Les camps politique, associatif et industriel figurent quelque orchestre et, pour éviter les couacs (quoiqu’ils adviennent quand même), des réunions jalonnent les agendas. « Après la première vague de menaces des tarifs douaniers, j'ai convoqué les associations minières pour leur demander quels étaient les impacts sur leurs membres, comment on pouvait les aider d'un point de vue gouvernemental à réduire les délais de traitement de leurs dossiers.
Quels étaient, selon eux, les freins ? Cet exercice-là, on l'a fait de manière régulière et encore plus dans le contexte actuel », fait valoir Mme Blanchette Vézina.

Commentaires

Inscrivez votre commentaire

Politique d'utilisation Politique de confidentialité

Agence Web - Caméléon Média